Technicien augmenté : les multiples apports de la computer vision à la maintenance
Faisant appel aux technologies de l’intelligence artificielle, la «vision par ordinateur» permet une détection automatique des composants défectueux. Dotés de leur seul smartphone, les techniciens de maintenance sur site deviennent ainsi «augmentés».
Comme M. Jourdain, vous avez certainement dû utiliser un service de computer vision sans le savoir. Sous-catégorie de l’intelligence artificielle, la vision par ordinateur consiste à traiter et à analyser des images ou des flux vidéo et d’en tirer des enseignements. Cette vision artificielle est notamment utilisée pour identifier un individu sur une photo postée sur les réseaux sociaux.
Pour «voir» comme des humains, la computer vision va s’appuyer sur des technologies de traitement d’image et d’apprentissage profond par des réseaux de neurones (deep learning). Dans notre monde devenu digital, les données «images» envahissent notre quotidien et les cas d’usage sont infinis, notamment dans le monde professionnel.
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La computer vision : des applications pratiques multiples
Dans le domaine de la vidéosurveillance, une caméra couplée à cette vision artificielle détectera automatiquement une tentative d’intrusion chez un particulier, une agression dans un parking, un bagage abandonné dans un aéroport, une personne au sol victime de malaise sur un quai de gare, ou un comportement agressif dans les transports en commun. Avec, bien sûr, tous les garde-fous juridiques et réglementaires nécessaires pour préserver le droit à la vie privée.
Avec l’avènement de la voiture connectée puis autonome, les constructeurs automobiles vont troquer les capteurs électroniques par des caméras intelligentes pour réduire au maximum le risque d’accident. Le système à bord analyse en continu le flot de données visuelles environnantes comme les panneaux de signalisation et mesure la distance avec les autres véhicules et les piétons afin de prendre, à tout moment, les bonnes décisions.
La computer vision ouvre aussi de belles perspectives dans le domaine de la santé (traitement de l’imagerie médicale), de la grande distribution (optimisation du rayonnage), de l’agriculture (détection de maladies depuis des photos aériennes des champs) ou du transport ferroviaire (surveillance des voies ferrés à partir d’un drone).
Du contrôle qualité à la maintenance prédictive
Mais c’est le secteur industriel qui a le plus à gagner de la computer vision, notamment dans le domaine du contrôle qualité. Une caméra dotée de la reconnaissance d’images et placée au-dessus d’une ligne de production détecte immédiatement les pièces défectueuses, déchargeant les opérateurs de cette tâche ingrate. La computer vision trouve aussi tout son intérêt dans l’inspection automatisée des infrastructures ou des bâtiments.
La vision par ordinateur peut être également utilisée en matière de maintenance prédictive afin d’identifier un problème ou une panne avant qu’elle ne se survienne. Par sa capacité à exploiter de façon neutre et sans se fatiguer des données images, la machine dépasse de loin les capacités humaines, offrant un gain de temps significatif pour un taux d’erreur très bas.
Bienvenue dans la maintenance analytique
Une fois capturées par la caméra, les données images sont transmises en temps réel à des algorithmes qui vont les analyser et émettre des recommandations comme lancer une opération de maintenance préventive en cas d’usure importante d’une pièce détachée. On parle alors de «maintenance analytique».
Pour Augustin Marty, PDG et co-fondateur de Deepomatic, startup spécialisée dans le développement de solutions de reconnaissance d’images pour les industriels, la computer vision s’applique parfaitement à la gestion des interventions.
Dans une tribune publiée sur le site de L’Usine Nouvelle, il explique qu’en équipant les smartphones des techniciens d’une application de reconnaissance visuelle, ces derniers peuvent «prendre en photo chaque étape de leurs opérations d’installation ou de maintenance, et bénéficier en temps réel de notifications sur la bonne démarche à suivre jusqu’à validation complète du travail effectué».
Augustin Marty parle alors de «techniciens augmentés». Ils gagnent, selon lui, en temps mais aussi en qualité de travail se formant au fur et à mesure grâce aux informations contenues dans l’application. Avec «un taux de réintervention devenu nul», les clients seraient aussi gagnants.
Des fournisseurs d’énergie…
Le startuper cite, comme exemple, la relève et la maintenance des compteurs de gaz, d’eau, d’électricité dont les interventions sont particulièrement redoutées par les particuliers. En cause ; le grand nombre d’erreurs de raccordement et les dégâts que cela provoque. Par ailleurs, «re-convenir d’un rendez-vous peut parfois relever du parcours du combattant.»
Du côté des fournisseurs d’énergie, ces réinterventions coûtent cher et il est très difficile d’avoir un œil sur toutes les opérations menées par les entreprises sous-traitantes qui interviennent en leur nom sur tout le territoire.
Dans une autre tribune pour L’Usine Nouvelle, Augustin Marty évoque un autre cas d’usage pour les distributeurs de réseaux d’énergie : l’inspection «intelligente» des pylônes électriques dont le mauvais entretien et la corrosion peuvent être à l’origine de coupures générales de courant et même, en Californie, de feux de forêt.
Aujourd’hui, le diagnostic de l’état de corrosion des pylônes se fait soit par l’ascension des pylônes et examen à l’œil nu, soit à partir de photos capturées par un drone. Ces dernières sont ensuite examinées visuellement pour détecter le degré de corrosion d’un support métallique.
Au regard du nombre de prises de vue à traiter, le diagnostic n’est pas établi sur site mais plus tard, de retour au bureau. La computer vision permet d’assurer le traitement automatiquement et en temps réel de ces données et même de classifier le niveau de corrosion des supports métalliques, de la corrosion superficielle à la corrosion perforante.
…aux opérateurs télécoms
Le secteur de l’énergie n’est pas le seul concerné. Les opérateurs télécoms peuvent également recourir à la computer vision. Client de Deepomatic, Bouygues Telecom utilise une solution de contrôle qualité pour ses techniciens mandatés qui interviennent sur site pour raccorder un abonné à la fibre. Munis d’un smartphone, ils prennent en photo le dispositif de raccordement.
Envoyées dans le cloud, les photos sont analysées par un réseau de neurones de reconnaissance d’image qui va remonter des anomalies comme, par exemple, une fibre non branchée ou des défauts de passage dans les chemins de câblage. En cas de doute, l’algorithme remonte une alerte au technicien qui garde la main sur la décision finale.
La SNCF mise, elle aussi, sur les apports de la computer vision pour renforcer significativement la sécurité ferroviaire. Depuis cinq ans, l’entreprise travaille sur le sujet dans les domaines de l’assistance à la conduite, de l’aide à l’exploitation, de la sécurisation ou du comptage de passagers.